Retrouvez mon interview dans la matinale de l’Opinion.
Députée du Doubs
Article publié dans le Figaro du 29 janvier 2018
Désormais secrétaire générale des Républicains, la Franc-Comtoise se donne pour mission d’«animer la vie du mouvement et de mettre en musique les orientations».
Samedi, en conseil national, Annie Genevard a eu la tâche ingrate de passer à la tribune après Valérie Pécresse au moment où la présidente de la région Île-de-France quittait la salle. Et avec elle, nombre de caméras. «Laurent est très attaqué… Mais c’est le privilège des hommes de caractère ; les insipides, eux, ne fâchent personne…», a rétorqué la secrétaire générale de sa voix calme. En bureau politique, mardi dernier, c’est déjà elle qui s’était chargée de répondre à Florence Portelli. L’ex-candidate à la présidence du parti avait critiqué le manque de représentativité au sein des instances du parti. La secrétaire générale est aussitôt intervenue, faisant valoir que la nouvelle équipe dirigeante n’avait jamais été aussi jeune et renouvelée.
On ne la voit pas toujours arriver, Annie Genevard. De son aveu même, elle est «une main de fer dans un gant de velours». «Quand j’ai des convictions, je les défends et j’essaye d’y être toujours fidèle.» Au moment des débats sur le mariage pour tous, la députée du Doubs, qui s’y est fermement opposée, s’est fait remarquer par sa présence assidue sur les bancs de l’Assemblée. Même en séance de nuit. Face à Najat Vallaud-Belkacem, Annie Genevard, ex-professeur de lettres classiques, venue à la politique par les questions de culture et d’éducation, se fait aussi connaître en reprochant à la ministre sa réforme du collège qui introduit la «langue arabe dans le programme national», au détriment «du français, des langues anciennes, qui sont nos racines, ou des langues européennes comme l’allemand» au risque «d’encourager le communautarisme qui mine la cohésion nationale».
Désormais secrétaire générale des Républicains, un «poste exposé», souligne-t-elle, elle devrait former avec Laurent Wauquiez «un binôme complémentaire», juge Christian Jacob, président du groupe LR à l’Assemblée. Si le président des LR se voit souvent accuser de parler fort, Annie Genevard sait dire assurément les mêmes choses sans grosse trompette. «Je n’aime pas la violence dans les rapports humains», glisse-t-elle.
Pour ne pas commettre d’impair, les premiers jours de sa prise de fonctions, elle avait d’ailleurs imprimé les statuts du parti pour connaître précisément la définition de son poste. «Laurent sait que je ferai le job, créer de la concorde entre nous, pour retrouver le plaisir du débat», indique celle qui goûte peu aux petites phrases et joutes médiatiques. En réfléchissant à son équipe, Laurent Wauquiez cherchait une «personne en qui il avait confiance, qui apaise et qui sache gérer une équipe», selon les termes d’Annie Genevard. Il lui a laissé cinq minutes pour se décider! Elle n’a mis qu’une condition pour accepter le poste: pouvoir garder son mandat de vice-présidente de l’Assemblée nationale, «un vrai beau poste politique», où elle s’efforce, dit-elle, «d’être juste», en restant ce qu’elle est. Le premier compliment sur sa gestion des débats au perchoir… est venu des communistes!
À 61 ans, la Franc-Comtoise, ex-maire de Morteau, qui n’oublie jamais d’envoyer une saucisse de sa ville pour promouvoir la gastronomie locale, connaît aussi très bien l’appareil du parti. Ex-secrétaire nationale aux fédérations, ex-secrétaire générale adjointe des Républicains, Annie Genevard se donne aujourd’hui pour mission d’«animer la vie du mouvement et de mettre en musique les orientations» du président.
Elle a d’ailleurs créé des groupes WhatsApp pour fluidifier la communication entre les nouveaux membres et demandé à l’équipe de se déployer dans les fédérations d’ici au mois de juillet. Celle qui avait soutenu François Fillon pendant la campagne dit ne pas «être dans la nostalgie», alors qu’il y a un an, le candidat était le favori de la présidentielle. «Je pourrais. On me disait ministrable. Tout laisse à penser que j’entrerais au gouvernement. Mais la politique est une école d’humilité… La roche Tarpéienne est proche du Capitole!», ajoute la latiniste. Désormais, elle préfère regarder «devant» et être «100 % à sa tâche».
Marion Mourgue
Interview publiée dans Le Figaro le 27 septembre 2017
INTERVIEW – La députée (LR) du Doubs, professeur de lettres classiques, estime que les propos «exagérément violents» du président du Conseil supérieur des programmes après sa démission «traduisent des préjugés et des procès d’intention» et mettent «en opposition le public et le privé».
Professeur de lettres classiques, députée du Doubs et secrétaire générale adjointe des Républicains, Annie Genevard a été membre du Conseil supérieur des programmes (CSP), installé en 2013 par Vincent Peillon, alors ministre de l’Éducation. Démissionnaire en août 2015, elle avait dénoncé l’absence d’indépendance de l’instance, pilotée alors par Michel Lussault. Elle décrit l’homme qui vient de claquer la porte comme «un proche de Najat Vallaud-Belkacem» qui «règle aujourd’hui ses comptes» avec le successeur de cette dernière.
LE FIGARO. – En démissionnant du CSP, Michel Lussault explique qu’il aimerait que «le modèle de l’école de la République ne soit pas celui de l’école jésuite». Que pensez-vous de ces propos?
Annie GENEVARD. – Exagérément violents, les propos de Michel Lussault trahissent sans doute son ressentiment d’avoir été contraint de démissionner. Mais ils traduisent aussi des préjugés et des procès d’intention. En attaquant l’école jésuite, en filigrane, il met en accusation une école qui serait réservée à une élite. Il met aussi en opposition le public et le privé. C’est un parti pris politique évident. Il se présente comme la voix de la démocratisation de l’école. Mais oublie-t-il les résultats des récentes enquêtes? En lecture, un jeune sur dix de moins de 25 ans a des difficultés. En mathématiques, la France est au-dessous de la moyenne européenne. Nous voilà précisément au cœur de la question de la démocratisation! Michel Lussault critique l’attention que l’actuel ministre de l’Éducation porte aux fondamentaux – lire, écrire, compter et respecter autrui -, en revendiquant, en parallèle, une nécessaire compréhension du monde «dans sa dimension multiculturelle» et une appréhension «des questions environnementales». Mais sans les savoirs clés, rien n’est possible. C’est une question de priorité. Les parents le savent. C’est la raison pour laquelle les propos de M. Blanquer recueillent leur adhésion.
En 2015, vous avez choisi de démissionner. Pour quelles raisons?
En vivant l’expérience de l’intérieur, j’ai pu constater l’absence de transparence et d’indépendance du CSP. Il existe une trop grande étanchéité entre ses 18 membres du conseil (8 parlementaires et 10 personnalités indépendantes, NDRL) et les experts qui fabriquent les programmes et qui sont toujours les mêmes depuis de nombreuses années. Ces experts, spécialistes dans leur discipline, ont défendu leurs chapelles. Les membres du conseil, installés pour garantir l’indépendance de la structure, se sont retrouvés en position d’arbitrage sans savoir réellement de quoi il retournait. C’est ainsi qu’est arrivé le prédicat, par exemple. Il n’y avait aucune indépendance. Michel Lussault n’a pas caché sa proximité avec Najat Vallaud-Belkacem. De même qu’il ne cache pas son hostilité à l’actuel ministre. Il règle aujourd’hui ses comptes. Ce n’est pas digne de la fonction.
Faut-il remettre en question le CSP dans son ensemble?
Il est clair que son fonctionnement doit être revu. La précipitation avec laquelle ses membres ont été sommés de travailler, pour coller à l’agenda politique, n’a pas contribué à en faire un lieu de réflexion. Le fait que le CSP ait été marqué par les démissions successives n’est pas anodin. Le prédécesseur de Michel Lussault avait jugé la tâche infaisable. Quant à M. Lussault, il a été recruté car on savait qu’il ferait politiquement le job. Il fallait un universitaire, mais aussi un militant ayant une approche sociale et sociétale de l’école.