Annie Genevard sur Europe 1 : « le débat de dimanche soir n’était pas à la hauteur de la fonction présidentielle »

Regrettant que l’on ait « abandonné les grands principes de l’interview politique » teintée de neutralité et d’objectivité de la part des journalistes qui a fait que « ces trois-là s’adressaient plus à eux-mêmes qu’aux Français qui étaient censés être éclairés », Annie Genevard, Secrétaire générale des Républicains, est restée sur sa faim à l’issue de l’interview du président de la République, dimanche soir.

Plaçant ce débat comme « le deuxième temps d’un plan de communication voulu », « paisible » sur TF1, « agressif » sur BFMTV, Annie Genevard a vu « la forme privilégiée sur le fond » dans un débat qui « n’était pas à la hauteur de la fonction présidentielle. »

Conséquence, « très peu d’annonces », relève Annie Genevard qui a réagi ce lundi matin au micro d’Europe 1. A l’exception, d’une « piste d’ébauche » pour la prise en charge de la dépendance par un jour férié travaillé, « ce qui constituerait un effort supplémentaire demandé aux Français », note la députée « les Républicains » du Doubs. Quant à la SNCF, « ce sont les Français qui paieront la dette à partir de 2020 avec un impact très probable sur la pression fiscale », avertit-elle.

Et en matière fiscale, Emmanuel Macron a marqué de son empreinte sa première année de présidence. « C’est 8 impôts nouveaux, 4,5 milliards d’euros de CSG en plus, 4 milliard d’impôts supplémentaires soit presque 9 milliards d’efforts supplémentaires demandés aux Français. Cela interroge et inquiète », relève Annie Genevard.

Sur les frappes opérées ce week-end en Syrie, « le soutien à la décision d’Emmanuel Macron n’est pas univoque. Elle posent des questions qui seront évoquées dans un débat légitime ce lundi à l’Assemblée nationale où pourront s’exprimer les sensibilités de tous les groupes politiques », remarque celle qui est également Vice-présidente de l’Assemblée nationale.

« Fallait-il intervenir hors d’un mandat onusien ? Les frappes punitives ont-elles montré dans le passé leur efficacité en matière dissuasive ? L’intervention a besoin d’être clarifiée sur les preuves. Il faut être très prudent car les conséquences peuvent être planétaires », souligne la Secrétaire générale des Républicains.

Interview : «Tout n’est pas fait pour protéger les Français de la menace terroriste»

J’étais invitée de la matinale de l’Opinion le 27 mars dernier. Retrouvez l’émission dans son intégralité ⤵

Financement libyen de la campagne de Nicolas Sarkozy : On nage en pleine fantasmagorie !

Députée du Doubs, vice-présidente de l’Assemblée nationale, Annie Genevard est aussi la secrétaire générale des Républicains. Un rôle délicat dans une période marquée, entre autres, par la récente mise en examen de Nicolas Sarkozy.

Il ne doit pas être de tout repos, votre poste de numéro 3 des Républicains, si ?

« Il consiste à mettre en œuvre les décisions stratégiques du parti, animer l’équipe dirigeante, organiser le lien avec les fédérations. J’ai accepté la fonction, qui n’est pas facile, par attachement profond à ma famille politique. Je ne cherche pas à exister en ourdissant des divisions pour régner. J’ai envie que la maison tourne, qu’elle soit un creuset qui rassemble gaullistes, centristes, libéraux et gens plus à droite pour qu’en émerge une ligne cohérente. Sans aucune collusion, jamais, avec le Front national qui est notre principal ennemi et veut notre mort. »

La maison tourne, mais à quel prix ! Vous venez de vendre votre siège national, tout en négociant pour continuer à l’occuper…

« Notre famille est en convalescence. En reconstruction. La vente du siège, c’est un très bon montage qui nous désendette à 80 % sur cinq ans, tout en conservant des marges de manœuvre financières pour les deux prochains rendez-vous politiques, les européennes et les municipales. Le symbole est fort : nous restons dans l’immeuble dont l’image est attachée à notre parti. C’est à l’opposé du symbole, catastrophique pour le Parti socialiste, du départ de la rue Solférino. »

Vous compatissez aux malheurs de la concurrence ?

« Il n’y a pas de démocratie accomplie sans partis politiques ! Un des points majeurs de mon opposition à Emmanuel Macron, c’est son dynamitage des partis de gouvernement. Stratégie qui, d’ailleurs, épargne curieusement les extrêmes. Je ne l’ai jamais entendu dire : «  Je veux déstabiliser le Front national et la France Insoumise. » eee En revanche, durant la campagne, il a expliqué qu’il voulait déstabiliser la droite en lui ouvrant les bras. Ces mots portent en germe une perspective préjudiciable à la démocratie, et que je refuse, celle d’un parti central, seul face aux extrêmes. »

Pourquoi, préjudiciable ?

« Le jour où ce parti s’écroule, quelle est l’alternative ? La France Insoumise tient par la figure de Mélenchon. Le Front national est complètement « out ». C’est le problème des mouvements constitués autour d’une personnalité. Le MoDem est dans la majorité. L’UDI lui est plutôt très favorable. Malgré l’estime que je peux avoir pour Olivier Faure, sûrement sincère dans sa volonté d’y remédier, le PS est très mal, réduit à peau de chagrin.

Les Républicains, c’est le dernier grand parti debout, le premier de l’opposition. Au delà de notre propre intérêt, cela nous confère une responsabilité considérable, pour la France : résister aux attaques en règle menées contre la démocratie. »

Vous pensez à la priorité absolue donnée à l’exécutif ?

« Je pense à sa volonté de museler et d’affaiblir le Parlement, à sa façon de tenir la presse à distance et de fournir des images et une communication officielle toutes prêtes, à celle, fort déplaisante, dont il traite les corps constitués. Quand Nicole Belloubet, Garde des Sceaux, dit : « Vous pourrez déposer moins d’amendements mais ils seront de qualité » , c’est injurieux. Quand la ministre de la Santé, Agnès Buzyn, juge : « Vous avez pu vous exprimer librement » … mais oui, et encore heureux ! C’est révélateur d’un gouvernement de technocrates. Macron a brouillé les cartes mais le jeu a ses limites. À nous de dissiper les illusions et de déchirer le voile. »

Et soudain, Nicolas Sarkozy est revenu sous les projecteurs judiciaires. Sincèrement, vous en auriez bien fait l’économie, non ?

« Chez nous, beaucoup ont hâte que cette affaire soit tranchée définitivement par la Justice ! D’abord pour Nicolas Sarkozy qui a quitté la politique mais reste à nos yeux une figure majeure. Nous ne pouvons pas être indifférents à l’épreuve terrible que traverse l’homme. C’est pourquoi il reçoit tant de soutiens. En plus, on nage en pleine fantasmagorie. On nous parle de dizaines de millions d’euros. Mais quand on a des dizaines de millions d’euros pour une campagne, on en fait quoi, concrètement ? Ils sont où ? On ne peut ni les déposer à la banque ni tout payer en liquide. Après, je pense que l’opinion fait la part des choses entre cette douloureuse affaire et l’avenir de la droite. »

Certains s’interrogent désormais sur les motifs de la guerre en Libye et les circonstances de la mise à mort de Kadhafi…

« Il est scandaleux et inimaginable qu’on puisse établir un tel lien avec la guerre en Libye ! Ce soupçon, je le trouve ignoble, gravissime et en plus, il est démenti par les faits. La France n’y était pas seule. Oui, cette guerre a déstabilisé la région avec les conséquences que l’on sait. On ne peut pas reprocher à Nicolas Sarkozy d’avoir provoqué la chute d’un tyran sanguinaire. On peut par contre reprocher à François Hollande de n’avoir rien fait ensuite, au nom de la France, pour contribuer à stabiliser la nouvelle Libye. »

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Dose de proportionnelle aux législatives : « Un tripatouillage avec Bayrou »
« Macron reprend toutes les ficelles de l’ancien monde. Je suis contre sa réforme des institutions et l’instauration d’une dose de proportionnelle pour l’élection législative. Au scrutin majoritaire, un député tient sa légitimité du peuple. Avec la proportionnelle, il tient sa légitimité d’un parti politique. Ce n’est pas du tout la même chose. En fait, c’est un tripatouillage, un accord avec Bayrou sans l’aide duquel jamais Macron n’aurait été élu. Le député est certes un législateur, mais il doit conserver son lien avec le territoire et ses concitoyens. »

Annie Genevard sur LCP : « Il y a à progresser dans la reconnaissance de la pleine légitimité des femmes en politique »

Dans le cadre de la journée internationale des droits des femmes qui se déroulera ce jeudi 8 mars, l’Assemblée nationale a décidé de célébrer les droits des femmes toute la semaine. Dans cet esprit, les séances de questions au Gouvernement de ces mardi et mercredi ont été confiées respectivement aux deux vice-présidentes de l’Assemblée nationale. Dont Annie Genevard, députée « les Républicains  » du Doubs. L’occasion pour la vice-présidente de l’Assemblée natioanle et Secrétaire générale des Républicains de donner son sentiment sur la place accordée aux femmes en politique.

LCP : Vous allez présider la séance de questions au Gouvernement de ce mercredi. Que ressentez-vous ?
Les séances de questions au Gouvernement sont les plus médiatisées. Permettre à des vice-présidentes d’assurer cette présidence a un retentissement particulier. C’est la raison pour laquelle j’avais proposé au président de l’Assemblée nationale de réserver, à l’occasion de cette semaine dédiée aux droits des femmes, les deux séances de questions au Gouvernement aux deux vice-présidentes.

LCP : 39% de femmes siègent dans l’hémicycle. Y-a-t-il encore des efforts à faire en matière de parité ?
Tant que nous n’aurons pas atteint la parité absolue vers laquelle nous devons tendre on peut considérer qu’il y a une marge de progression tant dans le quantitatif que dans le qualitatif. Il y a à progresser dans la reconnaissance de la pleine légitimité des femmes en politique. C’est un combat qui n’est pas achevé. Lorsque les femmes prennent la parole elles doivent être écoutées avec le même sérieux que lorsque les hommes prennent la parole. Elles doivent pouvoir s’emparer de sujets qui sont traditionnellement dévolus à des hommes. Il ne faut pas non plus que cela soit un combat qui exclut, qui fustige, qui condamne, qui montre du doigt. Il faut continuer à travailler à cette meilleure reconnaissance des femmes sans esprit de vindicte.

LCP : Le président de la République a décrété l’égalité femme-homme grande cause nationale pour 2018. Les projets du Gouvernement en matière de lutte contre les violences faites aux femmes, d’égalité salariale vont-ils dans le bon sens ?
On jugera aux résultats. Que les femmes soient bien moins rémunérées que les hommes, qu’elles soient davantage victimes de violences sont des constats que nous faisons depuis de très nombreuses années. Mais je pense que c’est une cause qui, globalement, progresse et dont la société prend conscience. Néanmoins j’observe que dans la politique du président de la République il y a un certain nombre de mesures qui ont été prises et qui ne sont pas favorables à la famille. Comme la prime d’accueil du jeune enfant. Cela est préjudiciable aussi aux femmes. Si nous sommes tous d’accord sur le constat, il faudra cependant être vigilant car depuis le temps qu’on réclame, par exemple, la parité de revenu à tâche égale et que celle-ci n’est pas au rendez-vous, cela montre bien que les déclarations ne suffisent pas et qu’il faut véritablement les juger à la lumière des résultats des politiques qui seront conduites. Je pense que cela peut également se faire aussi dans un esprit qui ne soit pas celui qui imprègne trop souvent le débat de l’égalité entre les hommes et les femmes, un climat parfois d’une extrême agressivité. Je ne pense pas que cela soit de nature à faire avancer la cause des femmes.

Retrouvez l’interview réalisée le mardi 7 mars (à partir de la 34ème minute).

Les Échos : Annie Genevard : « La violence à l’école est un angle mort du discours de Blanquer »

. Le nouveau bac est présenté ce mercredi en conseil des ministres

. Annie Genevard, Secrétaire générale des Républicains, juge Blanquer « habile » tout en soulignant des points de vigilance

Les Echos : Quatre épreuves, du contrôle continu : la réforme du Bac va-t-elle dans le bon sens ?

Annie Genevard : C’était sensiblement le programme que nous défendions lors de l’élection présidentielle : un bac recentré sur des épreuves fondamentales. Mais cela ne suffit pas. Nous veillerons à ce que l’année de terminale soit la plus complète et efficace possible car Parcoursup contraint à faire des choix très tôt. Et nous veillerons, surtout, à ce que le bac retrouve toute sa valeur et qu’il permette de diminuer l’échec universitaire. Tout cela se jugera à l’épreuve des faits.

Par étapes successives, l’exécutif change-t-il en profondeur, selon vous, le système scolaire ?

Je crois qu’il en a l’ambition et certaines mesures vont dans le bon sens. Jean-Michel Blanquer bénéficie de circonstances favorables. D’abord d’un effet de contrastes avec ses prédécesseurs : lui sait de quoi il parle. Ensuite, l’opinion publique est prête pour ces réformes. La droite, en assumant son rôle d’opposition et en faisant des propositions, a puissamment contribué à cette maturation en faisant émerger  des sujets importants comme la transmission des savoirs fondamentaux, l’évaluation du système scolaire ou  la formation des enseignants. Jean-Michel Blanquer bénéficie de ce travail préalable et cueille un fruit mûr. Mais il y a beaucoup de choses à surveiller dans la mise en oeuvre.

Vous parlez de Jean-Michel Blanquer comme d’un bon ministre…

L’homme est habile, il a une sensibilité proche de la nôtre, il avait travaillé sur le programme d’Alain Juppé.  Nous n’allons pas rejeter ce que nous préconisions depuis des années. Cela ne fait pas pour autant de lui un intouchable.

Quelle note mettriez-vous à ses débuts ? 

Je m’y refuse car il n’est ni un élève, ni un apprenti sorcier. La seule appréciation que je m’autoriserais serait « ne pas être trop sûr de soi » parce que sa tâche est immense. Mais il lui faut écouter l’opposition. Il y a matière à débattre, à alerter. Il y a des points de vigilance et quelques désaccords profonds.

Lesquels ?

D’abord la question du traitement équitable des territoires. Ce n’est pas une question démagogique, contrairement à ce que dit Jean-Michel Blanquer. Le dédoublement des classes dans les zones défavorisées ne peut pas se faire au détriment d’autres territoires, notamment ruraux. Avec Laurent Wauquiez et Christian Jacob, nous ne laisserons pas faire. Le deuxième point de vigilance est celui de la violence en milieu scolaire. Quand un groupe d’enseignants affirme que la République les « abandonne » (1), c’est un signal d’alerte fort. Or, la réponse de Jean-Michel Blanquer est trop courte. La question de la violence est un angle mort, un point aveugle de son discours. Certains établissements sont en état d’urgence.

Concrètement, quels enseignements faut-il en tirer ?

Il y a une dégradation continue de l’autorité de l’enseignant. Il faut à nouveau protéger l’école de la violence de la société, en mettant en place tous les outils nécessaires. La vidéo-protection est mise en place pour protéger les commerces,  les rues, pourquoi ne la mettrions-nous pas en place pour protéger les établissements scolaires ? Cela suppose aussi, dans certains établissements, un plan d’urgence à la hauteur. Il faut faire entrer des personnels dédiés à la protection pour éloigner les fauteurs de trouble. Et les sortir du lieu où ils sont nocifs. L’éloignement des élèves peut donc être éducatif ou, même, pénal. Cela peut aussi conduire à la reconnaissance de la défaillance éducative des parents, en cas de défaut avéré d’éducation. Les allocations familiales sont là pour aider les parents dans leur mission éducative. Si les parents sont défaillants, la question de l’allocation de ces moyens doit se poser.

Quels sont vos autres « points de vigilance » ?

Il faut évaluer la transmission des savoirs fondamentaux et faire en sorte que chaque élève-professeur se voit certifié dans les méthodes d’apprentissage. Aujourd’hui, en primaire, une opération peut être enseignée de quatre manières différentes ! Pour un élève fragile, ce n’est pas possible. Il faut réformer la formation des enseignants, et notamment la manière dont on enseigne les savoirs fondamentaux. La liberté pédagogique doit être subordonnée à l’efficacité pédagogique. Il faut aller jusqu’à la préconisation des méthodes.

Sur le projet de loi étudiants, critiquer l’exécutif tout en approuvant la sélection n’est-il contradictoire ?

Comme souvent, Emmanuel Macron ne fait qu’un petit bout du chemin. On nous annonçait une grande loi et ce n’est qu’une toute petite loi, avec la fin du tirage au sort et une vague remise à niveau en première année dont rien n’indique qu’elle sera évaluée. Tout ce qui peut s’apparenter de près ou de loin à une sélection est soigneusement émoussé dans le texte. Cette loi me laisse circonspecte et elle va être terriblement difficile à mettre en œuvre pour les universités.

(1) Allusion au lycée Gallieni de Toulouse qui a fait l’objet d’une enquête de « L’Express » et d’un rapport de l’Inspection générale de l’Education nationale.

 

Interview publiée dans les Échos